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Préjudice d’anxiété : fixation du point de départ du délai de prescription de l’action en réparation

Des salariés ayant été exposés à l’amiante demandaient la réparation de leur préjudice d’anxiété auprès de leur ancien employeur.

Un arrêt de la chambre sociale du 11 mai 2010 a reconnu aux victimes de l’amiante le droit d’être indemnisées au titre de ce préjudice dès lors que leur entreprise était inscrite sur une liste établie par un arrêté ministériel identifiant les sociétés et établissements où étaient fabriqués ou traités l’amiante ou des matériaux contenant de l’amiante. Cette inscription leur permet de bénéficier de l'allocation de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante. (ACAATA).

Dans le cas présent, la cour de cassation fait droit à leur demande en rappelant tout d’abord que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Elle relève ensuite que les salariés ont eu connaissance du risque à l'origine de l'anxiété le 7 juillet 2000 suite à la parution de l’arrêté qui a inscrit leur entreprise sur la liste des établissements permettant aux salariés concernés de bénéficier de l’ACAATA.

Elle précise enfin que suite à la modification des délais de prescriptions par la loi du 18 juin 2008, le délai pour agir des salariés contre leur ancien employeur expirait en 2013. Or, les salariés ayant saisi les prud’hommes en 2011, la prescription n’était pas acquise pour l’entreprise.

Dès lors, la Cour de cassation estime que les salariés sont fondés à demander réparation de leur préjudice et l’affaire sera rejugée par une cour d’appel.

Cass soc 19 novembre 2014, n° 13-19.263, FSPB


Suppression en vue de la durée minimale de travail de 24 heures hebdomadaires

La loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013 entrée en vigueur le 1er juillet 2014 interdit aux entreprises d’embaucher un salarié à moins de 24 heures par semaine. Cependant, des exceptions sont possibles, notamment si le salarié manifeste sa volonté de travailler en deçà de ce seuil ou en cas d’accord de branche. De même, les salariés de moins de 26 ans ne sont pas concernés.

Néanmoins, ces nouvelles règles sont mal perçues par les entreprises et le gouvernement a fait adopter un amendement durant les discussions du projet de loi  relatif à la simplification de la vie des entreprises l’autorisant à légiférer par voie d’ordonnance sur le travail à temps partiel.

Ce projet d’ordonnance, qui devrait être présenté en février en Conseil des ministres, propose d’autres exceptions et des dérogations à l’obligation d’un contrat hebdomadaire minimal de 24 heures.

Ainsi, ne seraient plus concernés les salariés intérimaires et les contrats à durée déterminée  conclus pour le remplacement d’un salarié. De même, les contrats à durée déterminée de moins de 8 jours ne seraient pas soumis à cette obligation.

Enfin, deux dérogations sont prévues par le projet d’ordonnance. Tout d’abord, le salarié pourra demander à travailler moins de 24 heures. Ce choix sera irréversible mais le salarié bénéficiera d’une priorité d’accès aux emplois disponibles d’une durée supérieure à 24 heures hebdomadaires. Ces dispositions s’appliqueront également aux contrats conclus avant ou après le 1er janvier 2014. Par ailleurs un accord de branche pourra fixer une durée minimale de travail hebdomadaire inférieure à 24 heures.

Le projet d’ordonnance relative à la simplification et à la sécurisation des modalités d’application des dispositions de la loi 2013-504 du 14 juin 2013 en matière de temps partiel


Pas de géolocalisation possible pour les salariés bénéficiant d’une liberté dans l’organisation de leur travail

Un salarié, qui occupait une fonction de technico-commercial et qui organisait librement son temps de travail a refusé que son employeur installe dans son véhicule de service un  système de géolocalisation, selon lui illégal car constituant un système de filature et de contrôle permanent.

La société, qui avait obtenue l’autorisation de la CNIL pour installer ce dispositif, considère alors que le refus du salarié constitue un acte grave d'insubordination et le licencie pour faute grave.

Le salarié saisi alors les tribunaux et la cour d’appel juge qu'il ne peut être reproché à l'employeur de vouloir connaître avec précision l'emploi du temps d'un salarié qui bénéficie d'une relative indépendance dans la gestion de son emploi du temps et dans l'exécution des missions qui lui sont confiées aux termes de son contrat de travail.

Les juges ajoutent que le refus manifeste et constant d'un salarié de se soumettre à une demande légitime de la part de son employeur, dans le but d'améliorer le fonctionnement de l'entreprise, constitue un acte manifeste d'insubordination et que le refus du salarié de se soumettre à une obligation légitime de son employeur constitue un acte grave d'insubordination qui justifie alors la rupture immédiate du contrat de travail, la poursuite de relations de travail s'avérant dans un tel cas impossible

Mais la cour de cassation, au visa de l'article L. 1121-1 du code du travail et de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme rappelle que nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché.

Puis,  la Cour suprême, réaffirmant une jurisprudence amorcée en 2011, confirme que l'utilisation d'un système de géolocalisation pour assurer le contrôle de la durée du travail n'est licite que lorsque ce contrôle ne peut pas être fait par un autre moyen et n'est pas justifiée lorsque le salarié dispose d'une liberté dans l'organisation de son travail.

Cass soc, 17 décembre 2014, n° 13-23.645, Inédit


Conditions d’engagement de la responsabilité pénale des personnes morales

Dans un arrêt récent, la chambre criminelle de la Cour de cassation a rappelé les conditions permettant de mettre en œuvre la responsabilité pénale des personnes morales dans un cas de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure à trois mois.

Une cour d’appel avait condamné une société à 3000 euros d’amende suite à des brulures occasionnées à un salarié lors d’une opération de vidange d’une nouvelle machine. Plus précisément, les juges du fond avaient considéré que la société avait failli à son obligation particulière de sécurité ou de prudence notamment en raison de l’absence de délivrance d’une formation interne spécifique du salarié chargé des manœuvres de vidange de cette machine. 

Mais la cour de cassation censure l’arrêt d’appel aux motifs que la cour d’appel n’a pas suffisamment recherché si, d’une part, l'obligation de formation au stage en cause était constitutive d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence au sens de l'article 222-20 du code pénal et d'autre part, si les faits reprochés avaient été commis, pour le compte de la personne morale poursuivie, par l'un de ses organes ou représentants au sens de l'article 121-2 du code pénal.

Cass. Crim, 2 septembre 2014, n° 13-83.956, FPBI


Une rupture conventionnelle peut être annulée en cas d’erreur de l’employeur sur le montant de la future allocation chômage du salarié

Un salarié, après avoir signé une rupture conventionnelle, demande son annulation pour vice de consentement et requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse, au motif que l’employeur lui a donné une information erronée sur le calcul de l’allocation chômage à laquelle il pouvait prétendre.

En l’espèce, après avoir signé une convention de rupture,  le salarié demande à bénéficier de l'allocation de retour à l'emploi. Il reçoit en retour une notification de POLE EMPLOI lui indiquant que le montant de ses droits est d'un tiers inférieur à celui auquel il pensait pouvoir prétendre. En effet, une partie des rémunérations déclarées par son ancien employeur dans le formulaire de rupture conventionnelle n’est pas prise en charge par POLE EMPLOI dans la mesure où elle correspond à la rémunération d'une période d'activité antérieure de plus d'un an à la rupture. Dans les faits,  la rémunération du salarié comportait une partie variable payée avec un décalage de plusieurs mois.

La cour d’appel après avoir constaté que le salarié bénéficiait d’un système de rémunération particulièrement complexe, considère que l’erreur commise par le salarié quant au montant de ses indemnités est le résultat, lors de la conclusion de la rupture conventionnelle, de la transmission au cours de l’entretien par l’employeur, de renseignements manifestement erronés. Dès lors, pour la Cour, le consentement du salarié a été vicié et la convention de rupture doit être annulée.

La chambre sociale de la Cour de cassation refuse dans son arrêt du 5 novembre 2014 de remettre en cause  l’appréciation souveraine des juges du fond et valide la décision.

Il faut noter que juridiquement l’employeur n’a aucune obligation d’informer le salarié du montant futur de ses allocations chômage. Le formulaire Cerfa de rupture conventionnelle mentionne uniquement que l’employeur doit « rappeler au salarié la possibilité qu’il a de contacter les services, notamment le service public de l’emploi, qui pourront l’aider à prendre sa décision en pleine connaissance de ses droits ».

Il semble donc que dans cette affaire les juges du fond aient sanctionné l’employeur pour ne pas avoir expliqué, au regard du mode de rémunération extrêmement complexe du salarié, comment il avait obtenu le montant de sa rémunération mensuelle brute des douze derniers mois précédents la rupture du contrat de travail.

Cass Soc 5 novembre 2014, n° 13-16.372, FD


Nouvelle articulation aide juridictionnelle et assurance de protection juridique

Un décret publié le 14 décembre 2014 a pour objectif d'améliorer l'articulation entre l'aide juridictionnelle et l'assurance de protection juridique en évitant le dépôt des demandes d'aide juridictionnelle si l'assureur peut prendre en charge le litige.


Ainsi, si le demandeur de l'aide juridictionnelle a déclaré disposer d'un contrat ou d'une garantie de protection juridique qui ne couvre pas les frais du procès et notamment la rémunération des auxiliaires de justice, il aura obligation de fournir une attestation de non-prise en charge délivrée par son assureur à l'appui de sa demande.

Le texte entre en vigueur deux mois après sa publication et les nouvelles dispositions s'appliqueront aux demandes d'aide juridictionnelle présentées après l'expiration de ce délai, soit à partir du 15 février 2015.


Décret 2014-1502 du 12 décembre 2014 relatif aux demandes d'aide juridictionnelle en cas de prise en charge par un dispositif de protection juridique


L’agenda parlementaire du Gouvernement pour 2015 en matière sociale

Lors du dernier conseil des ministres de l’année qui s’est tenu à l’Élysée le 22 décembre 2014, le gouvernement a présenté l’agenda parlementaire pour l’année 2015 Nous présentons les principales mesures en matière sociale.

Le  projet de loi relatif à la croissance et à l’activité sera examiné par l’Assemblée nationale à partir du 26 janvier 2015. Ce texte instaure de nouvelles dérogations au repos dominical, annule les sanctions pénales en matière de délit d’entrave, réforme la procédure des prud’hommes et apporte des modifications au régime de l’épargne salariale.

Par ailleurs, lorsque les partenaires sociaux seront parvenus à un accord sur la modernisation du dialogue social, un projet de loi sera soumis au Parlement afin de rendre plus effectifs les droits des salariés et de les adapter à la situation réelle des entreprises. Cette négociation, qui a pris beaucoup de retard en raison des difficultés pour le patronat et les syndicats à trouver un terrain d’entente,  porte sur la refonte du dialogue social et en particulier sur l’instauration de nouveaux seuils sociaux pour permettre à tous les salariés de bénéficier d’une représentation.

L’accord portera également sur les institutions représentatives du personnel, le gouvernement souhaitant clarifier les missions respectives des institutions représentatives du personnel (délégué du personnel, comité d’entreprise, comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail).  Enfin, le projet de loi relatif au droit des étrangers en France aborde les questions relatives aux travailleurs étrangers. Le gouvernement souhaite notamment renforcer l’attractivité de la France en facilitant la venue des talents internationaux et en généralisant le titre de séjour pluriannuel pour l’ensemble des étrangers, après un an de séjour en France. Le projet de loi a  été présenté en Conseil des ministres en juillet 2014 mais son examen par l’Assemblée nationale a été repoussé à 2015.

Compte rendu du conseil des ministres du 22 décembre 2014


Prud’hommes : bientôt la représentation obligatoire en appel ?

Dans son rapport sur « l’avenir des juridictions du travail » de juillet 2014, Monsieur Lacabarats préconisait de rendre obligatoire la représentation en appel devant la juridiction des prud’hommes, aujourd’hui facultative.

Cette disposition avait alors été intégrée dans l’avant-projet de loi Macron avant de disparaitre dans la version définitive du projet de loi déposé auprès de l’Assemblée nationale il y a quelques jours. Selon une  information émanant de la Chancellerie et reprise sur twitter, cette mesure serait finalement mise en place par voie réglementaire (décret).

 

Pour information, le projet de loi pour la croissance et l'activité  sera examiné en commission spéciale du 12 au 18 janvier 2015, et en séance publique à partir du lundi 26 janvier 2015

 

Par ailleurs, la loi relative à la désignation des conseillers prud'hommes a été publiée au JO du 19 décembre. Pour mémoire, ce texte habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance et dans un délai de 18 mois à compter de sa promulgation, les dispositions permettant de mettre en place de nouvelles modalités de désignation des juges prud'homaux et notamment le mode de désignation des conseillers, Les modalités de répartition des sièges par organisation dans les sections, collèges et conseils, la procédure de nomination, la durée du mandat, Le régime des autorisations d’absence des salariés pour leur formation à l’exercice de la fonction prud’homale ;

Dossier législatif du projet de loi pour la croissance et l’activité, sur le site de l’Assemblée Nationale

Rapport Lacabarats de juillet 2014 sur l’avenir des juridictions du travail

Loi 2014-1528 relative à la désignation des conseillers prud'hommes


Le vol de documents par un salarié est autorisé dans certains cas

La jurisprudence admet sous de strictes conditions qu’un salarié produise des documents émanant de l’entreprise dans le cadre d’un procès prud’homal. Il faut que ces documents soient obtenus dans l’exercice des fonctions du salarié et qu’ils soient strictement nécessaires à l’exercice de sa défense dans la procédure. (Cass soc 16 juin 2011, 10-85.079, FS-PBRI)

Un salarié, ayant appris qu’il allait être licencié avait dérobé, sous forme de photocopies, des documents quelques jours avant son entretien préalable.

Son employeur avait alors porté plainte pour vol. Le juge d’instruction puis la chambre de l’instruction de la Cour d’appel avaient prononcé un non-lieu.

La chambre criminelle de la cour de cassation confirme ce non-lieu à l’égard du salarié en jugeant que ce dernier ayant été informé du projet de son employeur de rompre son contrat de travail, avait appréhendé sous forme de photocopies des documents dont il avait eu connaissance à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, documents qui étaient strictement nécessaires à la défense de ses intérêts dans le litige prud'homal l'opposant au plaignant.

Cass crim 25 novembre 2014, n° 13-84.414, F-D


La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié doit manifester sa volonté claire et non équivoque de rompre son contrat de travail

Un salarié engagé en qualité de directeur d’agence, suite à un entretien préalable avec son employeur, adresse un courriel à ses collaborateurs dans lequel il annonçait son départ. Dans cette correspondance le salarié énonçait qu'« en ce qui me concerne, j'ai décidé de tourner une page de ma vie professionnelle, après trente-neuf années... trop courte, beaucoup de journées trop longues, beaucoup de plaisir et d'épanouissement aux cotés de mes collaborateurs, dont je suis sincèrement très fier ; donc il est temps de dire au revoir ».

Par la suite, et alors que le salarié saisi les juridictions aux fins de faire annuler la transaction signée avec son employeur et le faire condamner à lui verser des dommages et intérêts au titre de la rupture du contrat de travail, ce dernier prétend que la volonté de démissionner du salarié résultait clairement des termes de ce message électronique.

La cour de cassation rejette ce raisonnement et confirme la décision de la cour d’appel qui ayant constaté que le courriel invoqué par l’employeur avait été adressé par le salarié à ses proches collaborateurs le lendemain de l’entretien préalable au cours duquel il avait compris qu’il allait être licencié, a pu en déduire qu’il n’avait pas manifesté, par cet envoi, une volonté claire et dénuée de toute ambiguïté de démissionner.

Cass. soc., 24 sept. 2014, no 13-17.651, no 1534 F-D


Aspects sociaux du projet de loi pour la croissance et l’activité

Présenté en conseil des ministres le 10 décembre, ce projet de loi très volumineux (106 articles et une quinzaine d’ordonnances envisagées !) destiné à doper la croissance française, est très hétéroclite puisqu’il contient aussi bien des dispositions concernant le droit des sociétés, le droit des transports, l’urbanisme, les professions réglementées… que des dispositions en droit social qui seront développées ci-après.  Ce texte sera discuté selon la procédure accélérée (une seule lecture par assemblée) à partir du 23 janvier 2015.

Concernant le droit social, le titre III du projet de loi, sobrement appelé « Travailler » propose un certain nombre de mesures destinées à réformer certains pans du droit du travail. Nous en détaillons les principales ci-après.

  • Repos dominical (Articles 71 et suivants du PJ de loi)

Prenant acte d’un système de dérogations dominicales mille-feuille et parfois injuste pour les salariés, le gouvernement souhaite développer le  travail du dimanche en permettant notamment aux maires d’autoriser plus d’ouvertures dominicales aux magasins (passer de 5 à 12 ouvertures par an). En contrepartie, les salariés qui travailleront (uniquement sur une base de volontariat) toucheront obligatoirement une compensation salariale.

  • Réforme de la justice prud’homale (Article 83)

 La justice prudhommale est réformée en profondeur dans son organisation et dans son fonctionnement en vue de raccourcir les délais de procédures et de professionnaliser les conseils de prud’hommes.

Concernant les procédures, les délais seront considérablement raccourcis dès la phase de conciliation puisqu’un nouveau bureau de jugement en formation restreinte devra statuer sous trois mois. Par ailleurs la procédure pourra être accélérée en allant directement de la phase de conciliation à la formation de jugement présidée par un juge professionnel.

Concernant les conseillers, ils bénéficieront d’une meilleure formation initiale et continue obligatoire et leurs obligations déontologiques seront renforcées avec une refonte en profondeur prévue pour les procédures disciplinaires.

Enfin, un statut de défenseur syndical est créé.

Il est à noter que la représentation obligatoire en appel prévue initialement par le gouvernement n’est plus à l’ordre du jour.

  • Inspection du travail (article 85, 1°– Habilitant le gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance)

Le texte a pour but d’améliorer  les moyens d'intervention de l'inspection du travail en matière d'investigation, ainsi que dans le domaine de la santé et de la sécurité du travail. Parallèlement, les modes de sanction en matière de droit du travail seront révisés. Le texte de l'ordonnance visera à ce que la sanction soit le dernier recours : les phases de mise en demeure, d'avertissement et de contradictoire seront renforcées pour assurer l'accompagnement des entreprises de bonne foi et ne sanctionner que celles qui méconnaissent sciemment la loi.

  • Délit d’entrave (article 85, 2°) : Le texte supprime les peines d’emprisonnement tout en renforçant les sanctions financières.
  • Règles de licenciement (Articles 98 et s)

Dans le cadre des licenciements économiques, le texte permet aux entreprises de fixer le périmètre d’application des critères d’ordre des licenciements soit par un accord collectif soit par un document unilatéral à un niveau inférieur à celui de l'entreprise.

Le projet de loi pour la croissance et l'activité


Détention provisoire et première décision relative à la « déclaration des droits »

Selon l’article 803-6 du code de procédure pénale en vigueur depuis le 2 juin 2014, toute personne suspectée ou poursuivie et soumise à une mesure privative de liberté en application d'une disposition du présent code se voit remettre, lors de la notification de cette mesure, un document énonçant les droits dont elle bénéficie au cours de cette privation de liberté.

Un mineur, mis en détention provisoire demandait la nullité de l’ordonnance prescrivant la prolongation de la mesure aux motifs que le juge des libertés ne lui avait pas remis le document prévu à l’article 803-6 du code de procédure pénale. 

La chambre criminelle de la Cour de cassation écarte l'exception de nullité en relevant que l’article 803-6 ne prescrit pas la remise du document d'information lors de la prolongation de la détention provisoire.

Et d’une manière plus générale, les juges décident que le défaut de remise de ce document à la personne mise en examen, après le prononcé de son placement en détention provisoire, est sans incidence sur la régularité de cette décision

Cass. crim., 14 oct. 2014, n° 14-85.555, P+B+I

Déclaration des droits


Autorisation de licenciement annulée : prise en compte de la pension d’invalidité dans la fixation de l’indemnité du salarié

Un salarié protégé est licencié avec l’autorisation de l’inspecteur du travail puis cette autorisation est annulée.

Or l’annulation d'une décision d'autorisation de licenciement d’un salarié protégé lui donne droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s'il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision. S'il n'a pas demandé sa réintégration l'indemnité correspond à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois. (Article L. 2422-4 du code du travail)

Pour fixer cette indemnisation il y a lieu de prendre en compte tous les revenus que le salarié a pu percevoir pendant cette période. En l’espèce, la cour d’appel avait pris en compte le montant perçu au titre d’une rente d’invalidité complémentaire, ce que contestait l’employé.

La cour de cassation confirme la décision de la Cour d’appel en rappelant que la pension d'invalidité indemnise les pertes de gains professionnels et les incidences professionnelles de l'incapacité ; que les sommes perçues à ce titre, tant de la sécurité sociale que d'un régime complémentaire, doivent dès lors être prises en compte au titre des revenus de remplacement dans l'évaluation du préjudice subi par le salarié protégé licencié avec une autorisation de l'inspecteur du travail par la suite annulée.

Cass soc 29 septembre 2014, n° 13-15.733, FS-P+B


Précisions sur la confidentialité des documents transmis au comité d’entreprise

Une entreprise décide de mettre en place un plan réorganisation interne de plusieurs de ses services et dans le cadre de la procédure d’information consultation,  transmet  au comité central d’entreprise de nombreux documents, tous classés confidentiels.

Or, l’article L. 2325-5 du code du travail instaure auprès des membres du comité d'entreprise et des représentants syndicaux une obligation de discrétion à l'égard des informations revêtant un caractère confidentiel et présentées comme telles par l'employeur.

Le CCE saisit alors le juge des référés pour qu’il fasse interdiction à la société de se prévaloir des dispositions de l'article L. 2325-5  à propos de l'intégralité des documents et qu’il ordonne la reprise des procédures d'information sur la base de documents transmis sans mention de confidentialité.  

La cour d’appel fait droit à cette demande, décision confirmée par la Cour de cassation qui relève que pour satisfaire aux conditions de l'article L. 2325-5 du code du travail, l'information donnée aux membres du comité d'entreprise doit non seulement être déclarée confidentielle par l'employeur mais encore être de nature confidentielle au regard des intérêts légitimes de l'entreprise, ce qu'il appartient à l'employeur d'établir.

Or en l’espèce, en classant l’intégralité des documents adressés au CCE sous le sceau de la confidentialité, sans justifier de la nécessité d'assurer la protection de l'ensemble des données contenues dans ces documents, l’entreprise a porté une atteinte illicite aux prérogatives des membres du comité d'entreprise dans la préparation des réunions. Dès lors, la chambre sociale en conclut que cette atteinte ne peut être réparée que par la reprise de la procédure d'information et consultation à son début.

Dans le passé, la Cour de cassation a jugé que la preuve du caractère confidentiel des informations transmises peut être apportée par l’employeur par leur mention sur un procès-verbal (Cass soc 12.07.2006, n° 04-47.558)

Cass Soc, 5 novembre 2014, n° 13-17.270, FS-P+B


Le report de l'intervention de l'avocat au cours de la garde à vue est conforme à la Constitution

Le Conseil constitutionnel vient de rejeter une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur  les alinéas 6 à 8 de l’article 706-88 du CPP qui fixe des règles particulières applicables à la garde à vue d'une personne suspectée d'avoir commis une des infractions relevant de la délinquance ou la criminalité organisée.

Les  sixième à huitième alinéas de cet article prévoient que l'intervention de l'avocat au cours de la garde à vue peut être différée pendant une durée maximale de quarante-huit heures ou, dans certains cas, de soixante-douze heures (terrorisme et trafic de stupéfiants)

Or les demandeurs à cette QPC soutenaient que cette possibilité de différer l’intervention de l’avocat portait une atteinte excessive à la liberté individuelle et aux droits de la défense garantis par l'article 66 de la Constitution.

Le Conseil constitutionnel rejette la demande  en rappelant que le report de l’intervention de l’avocat est encadré et répond à un certain nombre de conditions.

Tout d’abord il n’est possible que pour des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l'enquête ou de l'instruction, soit pour permettre le recueil ou la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte aux personnes.

Par ailleurs, cette décision de reporter cette intervention doit être motivée et écrite et n’appartient qu’au magistrat chargé de la direction de l'enquête ou de l'instruction et, au-delà de vingt-quatre heures, au seul magistrat du siège. Ce report ne peut en tout état de cause excéder une durée de quarante-huit heures (ou soixante-douze heures en matière de terrorisme et de trafic de stupéfiants)

Enfin, la personne placée en garde à vue est informée, dès le début de la garde à vue, de la qualification, de la date et du lieu présumés de l'infraction qu'elle est soupçonnée d'avoir commise, du droit de consulter les documents mentionnés afférents ainsi que du droit « de se taire ».

Au regard de l'ensemble de ces éléments, le Conseil constitutionnel a jugé que les  dispositions  incriminées ne portaient pas une atteinte disproportionnée aux droits de la défense et étaient conformes à la Constitution.

Décision n° 2014-428 QPC du 21 novembre 2014

L'œil sur le droit

Protection du lanceur d’alerte : nullité du licenciement

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Un salarié, directeur administratif et financier d’une association, est licencié en mars 2011 pour faute lourde après avoir dénoncé au procureur de la République les agissements d’un des membres du conseil d’administration et du président de l’association susceptibles de constituer une escroquerie ou un détournement de fonds publics.

La Cour d’appel juge le licenciement sans cause réelle et sérieuse aux motifs que le salarié, dont la bonne foi ne pouvait être remise en cause, n’avait commis aucune faute en révélant les faits.

La Cour de cassation rappelle tout d’abord que que le fait pour un salarié de porter à la connaissance du procureur de la République des faits concernant l’entreprise qui lui paraissent anormaux, qu’ils soient au non susceptibles de qualification pénale, ne constitue pas en soi une faute.

Mais surtout et pour la première fois décide qu’ «en raison de l’atteinte qu’il porte à la liberté d’expression, en particulier au droit pour les salariés de signaler les conduites ou actes illicites constatés par eux sur leur lieu de travail, le licenciement d’un salarié prononcé pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits dont il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions et qui, s’ils étaient établis, seraient de nature à caractériser des infractions pénales, est atteint de nullité ».

Il est à noter que la protection des lanceurs d’alertes est actuellement en discussion dans le cadre du projet de loi Sapin II

Cass Soc 30 juin 2016, n° 15-10.557, FS-PBRI

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L'actualité du droit

Publication du décret relatif aux modalités de consultation des institutions représentatives du personnel (IRP)

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Ce texte, entré en vigueur depuis le 1er juillet 2016, concerne les entreprises de 50 salariés et plus.

Il précise les délais dans lesquels les différentes IRP remettent leurs avis, ainsi que les modalités de fonctionnement du CHSCT.

Il énonce également les informations que l’employeur met à la disposition du comité d'entreprise (CE) dans le cadre des trois grande consultations annuelles prévues par la loi Rebsamen du 17 août 2015 sur le dialogue social (consultations qui regroupent les 17 anciennes obligations d’information et de consultation du CE).  Ces trois rendez-vous annuels concernent les orientations stratégiques de l’entreprise, sa situation économique et financière et enfin la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi.

Les informations à transmettre au comité d’entreprise diffèrent selon que l’entreprise compte plus ou moins de 300 salariés et pour chacune de ces consultations, le CE peut recourir à un expert payé en tout ou partie par l’employeur.

Décret 2016-868 – JO 30 juin 2016 

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