Nos revues d'actualité



Une sieste au travail peut être constitutive d’une faute grave

Un salarié est embauché en 1979 en contrat à durée indéterminée en qualité de pompier d’aéroport. Ses fonctions consistent à assurer la protection des aéronefs et des passagers en éloignant tous types d'animaux susceptibles de percuter un avion.

Le 25 juillet 2011, il est licencié pour faute grave au motif que le 6 juillet, il a été surpris à faire la sieste dans son camion au lieu de surveiller les pistes. Pour justifier  son endormissement, le salarié fait valoir que son employeur n'a pas respecté les dispositions légales et conventionnelles relatives à la durée quotidienne maximale du travail et met en avant la dureté de ses conditions de travail mais aussi que cette sieste n'a eu aucune conséquence pour l'employeur ou son client.

Cependant la Cour d’appel relève que le salarié a volontairement organisé son véhicule pour y faire la sieste, que la tour de contrôle a cherché à le joindre à plusieurs reprises sans succès et que son supérieur qui l’a trouvé profondément endormi dans son véhicule avec le siège du dossier en position semi-allongée, les écouteurs de son téléphone personnel sur les oreilles et des journaux étalés de toutes parts dans son véhicule.

La Cour d’appel décide que ces agissements, eu égard aux fonctions du salarié, pompier affecté à la sécurité d'un aéroport, est constitutif d'un manquement d'une importance telle qu'elle a empêché la poursuite de la relation salariale, même pendant la période du préavis et relève bien d’une faute grave.

CA Bordeaux, 17 février  2016, RG n°13/05556


Preuve de la reconnaissance de dette par SMS

Un homme soutient avoir prêté la somme de 4000 euros à son ex-concubine mais ne peut justifier d’aucune reconnaissance de dette. Il ne dispose que de messages reçus sur son téléphone par son ex-compagne qui démontrent selon lui que la somme avait été avancée à titre de prêt.

La Cour d’appel rappelle qu’il doit être passé acte devant notaire ou sous signatures privées de toutes choses excédant la somme de 1.500 euros mais qu’en application de l'article 1348 du code civil, cette règle peut recevoir exception, notamment lorsque l'une des parties n'a pas eu la possibilité matérielle ou morale de se procurer une preuve littérale de l'acte juridique. Or la cour relève qu’en l’espèce, les relations intimes liant les parties ont pu empêcher le demandeur de se procurer un écrit.

Elle ajoute que peut encore être dérogé à l’existence d’une preuve littérale en application de l'article 1347 du code civil, un commencement de preuve par écrit, c’est-à-dire un acte émanant du débiteur poursuivi et rendant vraisemblable le fait allégué. Or, l’ex-concubine avait envoyé deux SMS à son ex-compagnon lui demandant s'il était « toujours prêt à (lui) avancer et qu'(elle le) rembourse petit à petit »,  puis elle lui demandait un « relevé » pour lui « faire des virements sur (son) compte ».

Dès lors pour la cour, cette dernière avait reconnu de façon claire et explicite l'existence d'un prêt de 4.000 euros qu'elle s'engageait à rembourser.

CA Grenoble, du 05 avril 2016, RG 13/04687


Proposer un reclassement à un salarié inapte n’oblige pas à le former à un nouveau métier

Une salariée, documentaliste, est déclarée inapte à tout poste dans son entreprise. Elle conteste son licenciement au motif que son employeur ne lui a pas proposé un reclassement sur un poste de technicien informatique.

Mais la cour de cassation rejette cette argumentation et rappelle que dans le cadre de l’obligation de reclassement préalable, l’employeur n'est pas tenu de donner au salarié une formation de base différente de la sienne et relevant d'un autre métier.

Cass soc 16.03.2016, n° 13-25.927


Portée de la cause économique dans la lettre de licenciement

Dans le cadre d’un licenciement pour motif économique, l’article L. 1233-16 du code du travail prévoit que l’employeur doit énoncer ces motifs économiques afin de permettre au salarié de pouvoir les discuter et fixer les limites du litige.  L’article L. 1233-3 du code du travail prévoit que la lettre doit également énoncer la cause économique du licenciement et l'incidence matérielle de cette cause économique sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié.

La Cour de cassation vient de préciser qu’une lettre est suffisamment motivée dès lors qu’elle mentionne la suppression de l'emploi du salarié consécutive à la réorganisation de l'entreprise justifiée par des difficultés économiques et (ou) la nécessité de la sauvegarde de sa compétitivité. Elle n’a pas à préciser le niveau d'appréciation de la cause économique quand l'entreprise appartient à un groupe.

Cass Soc 3 mai 2016, n° 15-11046, FSPB


Prolongation du congé parental et licenciement pour faute grave

Une salariée fait une demande de congé parental d'éducation pour une durée d'un an, à l'issue duquel elle ne reprend pas le travail. Après de nombreuses mises en demeure de justifier son absence restées sans réponse, elle est licenciée pour faute grave. Devant le Conseil des Prud’hommes, la salariée soutient que l'obligation d'informer son employeur au moins un mois avant le terme initialement prévu de son désir de prolonger son congé parental n'est pas une condition à la prolongation de ce congé mais simplement un moyen de preuve de l'information de l'employeur.

Mais la Cour de cassation rejette cette argumentation et décide que si ces formalités ne sont pas une condition du droit du salarié au bénéfice de cette prolongation, celui-ci se trouve, à défaut de justifier d'une demande de prolongation ou d'autres causes de son absence à l'issue du congé parental d'éducation, en situation d'absence injustifiée constitutive d’une faute grave.

Cass. soc., 3 mai 2016, n° 14-29.190, FS-P+B


Visite médicale tardive et repos minimum non respecté justifient une résiliation judiciaire du contrat de travail.

Une salariée demande et obtient la résiliation judiciaire de son contrat de travail sur la base de deux manquements considérés comme suffisamment graves par la Cour de cassation pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

D’une part, l'employeur n'avait convoqué sa salariée à la visite médicale d’embauche que le 12 mars 2012 pour une embauche réalisée le 11 octobre 2010. De plus cette visite avait été organisée postérieurement au refus par la salariée de réintégrer l'entreprise. D'autre part l’employée avait assuré un service de garde de nuit sur un matelas pneumatique à même le sol et sans bénéficier de son droit à un repos quotidien d'une durée minimum de onze heures consécutives.

Peu importe pour la Cour que ces deux faits aient été antérieurs de plusieurs mois à la demande de résiliation judiciaire, ces différents manquements étaient d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail et justifier la résiliation judiciaire de ce contrat.

Cass Soc, 15 avril 2016, n° 14-17183


Réunion syndicale et mise à disposition d’un local

La Cour de cassation vient de rappeler que conformément à l’article L 2142-10 du code du travail, lorsque la participation de personnalités syndicales extérieures est prévue  à des réunions syndicales qui doivent se tenir dans l’entreprise, mais en dehors du local syndical mis à la disposition du syndicat, l’accord de l’employeur est nécessaire.

Cass soc 12 avril 2016, n° 15-60.190


Le manque d’implication du salarié justifie la rupture de la période d’essai

La cour de cassation décide que l'employeur qui justifie un manque d'implication du salarié dans l'entreprise et d'une insuffisance dans ses contacts avec les clients peut mettre fin à la période d’essai du salarié sans que cette rupture soit considérée comme abusive ou discriminatoire.

Cass Soc 15 avril 2016, n° 14-22.128


Déclaration d’aptitude et refus par le salarié de reprendre son poste réaménagé

A la suite de plusieurs accidents du travail, un salarié, conducteur offset, est déclaré inapte à son poste de travail à l'issue de deux visites médicales de reprise, mais apte à un poste sans manutention. Puis lors d’une visite  ultérieure,  il est déclaré apte au poste de conducteur offset suite à l'aménagement proposé par l’employeur, « sans manutention ni position prolongée en flexion antérieure du tronc". Il refuse cependant de réintégrer son poste et demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Refus de la Cour de cassation qui décide que lorsque le salarié a fait l'objet d'un avis d'aptitude à son poste, lequel s’est imposé à lui à défaut d’un recours devant l'inspecteur du travail, l'employeur qui propose la réintégration du salarié sur son poste réaménagé, conformément aux préconisations du médecin du travail, n'a pas commis de manquement en ne procédant pas à un licenciement pour inaptitude, ni à une recherche de reclassement.

Cass Soc 13 avril 2016, n° 15-10.400, FSPB


Selon le conseil de prud’hommes de Paris, « PD » n’est pas une insulte homophobe

Un salarié est recruté en qualité de coiffeur par contrat à durée indéterminée assorti d’une période d’essai de deux mois. Au cours de sa période d’essai, il reçoit par erreur un texto de sa supérieure hiérarchique qui indique « Je ne garde pas X […] Je ne le sens pas ce mec. C’est un pd, ils font tous des coups de pute ». Le lendemain la rupture de sa période d’essai lui est notifiée par oral. Le salarié saisit alors le CPH de diverses demandes dont une indemnité pour préjudice moral en raison du caractère odieux et vexatoire de la rupture de sa période d’essai.

Saisi parallèlement par le salarié, le défenseur des droits présente ses observations devant le Conseil de prud’hommes arguant que l’employeur n’apporte pas la preuve que sa décision de mettre un terme au contrat de travail du salarié au cours de la période d’essai est fondée sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Cependant les juges du fond, tout en retenant la qualification d’injure pour l’utilisation du terme « PD » dans le SMS, décident de manière singulière que le caractère discriminatoire de la rupture du contrat de travail et le caractère homophobe du terme « PD » ne sont pas établis dès lors « qu’il est reconnu que les salons de coiffure emploient régulièrement des personnes homosexuelles, notamment dans les salons de coiffure féminins, sans que cela ne pose de problèmes »

CPH Paris, 16 décembre 2016, RG F 14/14901


Les propositions de reclassement en cas d’inaptitude d’un salarié n’ont pas à être nécessairement écrites

L’article L 1226-10 du code du travail fait obligation à l’employeur de proposer au salarié déclaré inapte par le médecin du travail  un autre emploi approprié à ses capacités.

Cependant, la cour de cassation vient de rappeler qu’aucun texte n'exige que la proposition de reclassement soit effectuée par écrit, cette exigence ne concernant que les offres de reclassement proposées au salarié dont le licenciement pour motif économique est envisagé. Dès lors, une proposition de reclassement énoncée oralement par l’employeur et refusée par le salarié est valable.

Cass Soc 31 mars 2016, n° 14-28.314, PB


Entretien préalable et demande par le salarié d’une nouvelle convocation

Un salarié est convoqué à un entretien préalable au licenciement. Il demande le report de ce dernier le jour même ce que l’employeur refuse.

La Cour d’appel décide que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse  dès lors que le refus méconnait volontairement les dispositions de l'article 27 de la convention collective applicable au salarié qui prévoient « qu'aucun licenciement, même pour faute grave, ne peut être confirmé sans que l'intéressé ait été, au préalable, mis à même d'être entendu, sur sa demande, par l'employeur ou son représentant responsable ».

Cassation de la Cour qui considère que le salarié a été convoqué conformément aux dispositions de l'article L. 1232-2 du code du travail et que les dispositions conventionnelles applicables en l’espèce n'obligeaient pas l'employeur à faire droit à sa demande d'une nouvelle convocation. 

Cass Soc 06 avril 2016, n° 14-28.815


Licenciement et modalités de renonciation à un mandat syndical

Un salarié, par ailleurs délégué syndical, demandait  la nullité de son licenciement pour non-respect  de son statut protecteur. La Cour d’appel pour le débouter, s’appuyait sur une lettre du salarié qui évoquait une démission de ses fonctions de délégué syndical alors que ce dernier  soutenait que ce courrier n'était qu'une note destinée aux salariés et incidemment à l'employeur suite aux pressions que ce dernier  exerçait  sur l'ensemble du personnel pour qu'aucun candidat ne se présente aux élections.   

La Cour de cassation lui donne raison rappelant que si un délégué syndical peut renoncer à son mandat, en informant l'organisation syndicale qui l'a désigné de sa renonciation, en l’espèce, les juges du fond n’avaient pas constaté que le salarié avait procédé à cette information. Dès lors, il résultait que ce mandat n'avait pas pris fin et que le salarié ne pouvait être licencié sans autorisation de l'inspecteur du travail.

Cass Soc 6 avril 2016, n° 14-23.198, FSPB


Une ordonnance renforce les moyens de contrôle de l’inspection du travail

Ce texte, qui s’appliquera à compter du 1er juillet 2016 prévoit un renforcement des prérogatives du système d'inspection du travail pour garantir une plus grande efficacité des contrôles.

Sont notamment prévus l’élargissement des dispositifs d’arrêt temporaire de travaux et d’activité pour que l’inspection du travail puisse mettre en sécurité les travailleurs exposés à des risques graves et mortels, l’élargissement des moyens d’accès aux documents de l’entreprise afin de faciliter le travail d’enquête et le renforcement des moyens de recours à une expertise technique et à des diagnostics pertinents en matière de santé et de sécurité au travail pour déterminer les actions de prévention à mettre en œuvre.

Par ailleurs les sanctions en cas de manquements sont révisées. Le montant des amendes est alourdi et les sanctions pénales intègrent la transaction pénale et l’ordonnance pénale.

Ordonnance n° 2016-413 du 7 avril 2016 relative au contrôle de l'application du droit du travail


Clause de mobilité et lieu d’exécution du préavis de licenciement : c’est l’employeur qui décide

Un salarié est licencié pour refus de mise en œuvre de la « clause de mobilité » prévue par son contrat de travail. L’employeur exige que le salarié exécute son préavis dans les nouveaux locaux. Le salarié refuse et soutient avoir été mis dans l'impossibilité d'exécuter son préavis dès lors que l'employeur avait exigé que celui-ci soit effectué à Asnières alors même qu'il se trouvait licencié précisément au motif qu'il avait refusé sa mutation en ce lieu, travaillant et habitant à Antibes.

La cour de cassation, décide que l'employeur, qui avait licencié le salarié à raison de son refus de ladite mutation peut lui imposer d'exécuter son préavis dans les conditions nouvellement prévues. Dès lors le refus par ce dernier le prive des indemnités compensatrices de préavis et de congés payés afférents.

Cass Soc 31 mars 2016, n° 14-19.711 FSPB

L'œil sur le droit

Protection du lanceur d’alerte : nullité du licenciement

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Un salarié, directeur administratif et financier d’une association, est licencié en mars 2011 pour faute lourde après avoir dénoncé au procureur de la République les agissements d’un des membres du conseil d’administration et du président de l’association susceptibles de constituer une escroquerie ou un détournement de fonds publics.

La Cour d’appel juge le licenciement sans cause réelle et sérieuse aux motifs que le salarié, dont la bonne foi ne pouvait être remise en cause, n’avait commis aucune faute en révélant les faits.

La Cour de cassation rappelle tout d’abord que que le fait pour un salarié de porter à la connaissance du procureur de la République des faits concernant l’entreprise qui lui paraissent anormaux, qu’ils soient au non susceptibles de qualification pénale, ne constitue pas en soi une faute.

Mais surtout et pour la première fois décide qu’ «en raison de l’atteinte qu’il porte à la liberté d’expression, en particulier au droit pour les salariés de signaler les conduites ou actes illicites constatés par eux sur leur lieu de travail, le licenciement d’un salarié prononcé pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits dont il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions et qui, s’ils étaient établis, seraient de nature à caractériser des infractions pénales, est atteint de nullité ».

Il est à noter que la protection des lanceurs d’alertes est actuellement en discussion dans le cadre du projet de loi Sapin II

Cass Soc 30 juin 2016, n° 15-10.557, FS-PBRI

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L'actualité du droit

Publication du décret relatif aux modalités de consultation des institutions représentatives du personnel (IRP)

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Ce texte, entré en vigueur depuis le 1er juillet 2016, concerne les entreprises de 50 salariés et plus.

Il précise les délais dans lesquels les différentes IRP remettent leurs avis, ainsi que les modalités de fonctionnement du CHSCT.

Il énonce également les informations que l’employeur met à la disposition du comité d'entreprise (CE) dans le cadre des trois grande consultations annuelles prévues par la loi Rebsamen du 17 août 2015 sur le dialogue social (consultations qui regroupent les 17 anciennes obligations d’information et de consultation du CE).  Ces trois rendez-vous annuels concernent les orientations stratégiques de l’entreprise, sa situation économique et financière et enfin la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi.

Les informations à transmettre au comité d’entreprise diffèrent selon que l’entreprise compte plus ou moins de 300 salariés et pour chacune de ces consultations, le CE peut recourir à un expert payé en tout ou partie par l’employeur.

Décret 2016-868 – JO 30 juin 2016 

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